L’hôpital des Invalides accueille les plus grands blessés de guerre, anciens résistants et victimes des attentats. Un documentaire nous plonge dans ses coulisses, lundi 25 mars 2019 sur France 3... (article paru dans le journal le parisien du 23 mars 2019 ).(suite de l'article)
Institut national des Invalides, rue de Grenelle (VIIe). Joffrey, Nicolas et le « petit Geoffrey », 23 ans, se retrouvent dans une des cours de l’hôpital. LP/Céline Carez
L’hôpital des Invalides accueille les plus grands blessés de guerre, anciens résistants et victimes des attentats. Un documentaire nous plonge dans ses coulisses, lundi sur France 3.
C’est un hôpital parisien au cœur des Invalides, presque secret, plutôt méconnu, une pépite silencieuse du patrimoine au parfum d’histoire de France.
Lundi soir, à 23h40, sur France 3 Paris Ile-de-France, le documentaire inédit « Invalides, la maison des blessés », de Myriam Kebani, vous plongera dans ses coulisses.
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Il y a Geoffrey, 23 ans, soldat, dont le véhicule blindé a sauté il y a deux ans sur une mine au Mali, le jeune Mathieu, victime du Bataclan, la lumineuse Edith, 86 ans, qui a eu une jambe arrachée par le camion bélier de l’attentat de Nice, Joffrey, 40 ans, qui a eu un AVC à Djibouti.
Fondé par Louis XIV
Bienvenue à l’Institut national des Invalides (INI), surnommé « l’hôpital des gueules cassées ». Cet hôpital, rue de Grenelle (VIIe), qui s’étale sur 16 ha et qui s’offre aussi une méga phase de travaux et un nouveau partenariat (lire ci-dessous) a été fondé par Louis XIV. Le roi « ne voulait pas que les soldats blessés se retrouvent à la rue », précise un militaire. Quatre-vingt-onze chambres sont réparties entre deux beaux bâtiments, certaines avec vue sur le tombeau de Napoléon !
« L’INI est un établissement administratif public (EPA) qui dépend du ministère des Armées, précise Michel Guisset, le directeur et médecin général du service de santé des Armées. On accueille les blessés lourds. Le plus âgé est un colonel de 103 ans qui a participé à la Libération. Le plus jeune, 28 ans, est une victime des attentats ».
Philippe Lançon, victime de Charlie Hebdo, y a séjourné
« Ici, ajoute Elisabeth, infirmière, au chevet d’une vieille dame, ancienne déportée, qui a connu aux côtés de Simone Weil l’enfer d’Auschwitz, ce n’est pas l’AP-HP (Assistance publique - Hôpitaux de Paris, NDLR) ! ». Traduisez : hôpital différent, où les moyens pour s’occuper de malades exceptionnels sont conséquents.
Philippe Lançon, victime de l’attentat de Charlie Hebdo, auteur du «Lambeau», prix Fémina 2019, y a séjourné et raconte sur des dizaines de pages les Invalides.
Ces dernières années, dans un contexte dramatique d’attentats, l’INI a bénéficié d’un nouvel éclairage. Tous les Français ont vu, à Paris ou à la télévision, le Président de la République, les officiels, les familles et les victimes lors des hommages officiels.
Myriam Kebani n’est pas revenue indemne de ce tournage qui l’a mobilisée un an. « Pour moi, les Invalides, raconte la Parisienne, c’étaient juste le Dôme, le musée de l’armée, le tombeau de Napoléon. En fait, j’y ai découvert un hôpital exceptionnel, une vraie maison, qui accueille ces grands blessés de guerre et qui transpire la solidarité et la bienveillance ».
Mustapha, 30 ans dédiés aux Invalides
Mustapha.LP/C.C.
Déjà enfant, Mustapha connaissait le site des Invalides. Le petit Parisien habitait juste à côté, à Sèvres-Babylone (VIIe). « Je venais jouer à cache-cache dans les jardins avec mes copains de l’école primaire. Un signe ! », sourit-il.
Aujourd’hui, celui qui est devenu infirmier-coordinateur a eu le temps de peaufiner ses connaissances des lieux… Cela fait 30 ans que Mustapha, surnommé Mouss, travaille à l’INI (Institut national des Invalides). « 19 ans en chirurgie, 7 en rééducation », précise-t-il.
Il connaît l’hôpital par cœur, son histoire, ses chambres et ses couloirs, la cour d’honneur de cet hôpital classé monument historique « qui m’émerveille encore », ses protocoles de soins pour des blessés lourds de guerre, ses patients illustres et anonymes. « Ici on connaît le nom de chaque pensionnaire », insiste-t-il.
Ce jeudi, alors que Mustapha a fini sa journée depuis une heure, il bavarde dans une chambre avec une vieille dame, pensionnaire, ancienne déportée. « J’ai un respect pour toutes ces femmes et ces hommes, résistant(e) s, anciens déportés(e) s, victimes des attentats. Aux Invalides, ce n’est pas un hôpital lambda. C’est l’histoire de France qui est là. Et ici, il y a des valeurs, les valeurs de la réparation ».
«Petit Geoffrey», 23 ans, a sauté sur une mine au Mali
« Petit Geoffrey » (debout au second plan).LP/C.C.
Aux Invalides, il y a un Joffrey qui a 40 ans et un Geoffrey qui a 23 ans. Le dernier a été surnommé le Petit Geoffrey. Dans le documentaire de Myriam Kebani, on les voit tous les deux.
Il y a trois ans, à l’âge de 20 ans, le Petit Geoffrey, beau gosse, blouson de cuir décoré d’une broche de l’aviation américaine, s’est engagé « fier de son drapeau » dans l’armée française. Il y a deux ans, en mission au Mali, son véhicule blindé a sauté sur une mine anti char. Le jeune soldat, très grièvement blessé, multifracturé, paralysé de la colonne vertébrale, a été rapatrié en France par l’armée avec ce qu’il appelle « une jambe morte ».
Le petit Geoffrey a d’abord passé un an et demi à l’hôpital militaire de Percy, à Clamart (Hauts-de-Seine), en rééducation. Puis est arrivé aux Invalides, à l’INI où il devrait rester jusqu’à la fin de l’année, en rééducation. « Je n’avais plus de toit, se souvient le jeune soldat. Je n’étais pas autonome. Ici, c’est quelque chose d’unique au monde ».
Des travaux en vue
Les Invalides continuent leur mue. Après une vague de travaux, un lifting à 22 M€, qui devrait s’achever à la fin de l’année avec la rénovation des façades, des sculptures, des toits en ardoise et des vitraux du dôme, place aux travaux intérieurs de l’hôpital.
« Les travaux de rénovation de l’hôpital commenceront après l’été », précise Michel Guisset, le directeur de l’INI, médecin général inspecteur.
Par ailleurs, un nouveau partenariat est lancé entre les Invalides et les deux hôpitaux militaires de Percy à Clamart (Hauts-de-Seine) et de Bégin, à Saint-Mandé (Val-de-Marne). « Nous sommes en train de rédiger la convention, ajoute Michel Guisset. C’est pour améliorer et fluidifier la prise en charge des blessés. Ce sera mis en place en fin d’année ».